Ngaliema : machettes en mains, les kuluna dictent la loi dans les quartiers  C.A.C et Manenga. L’Etat interpellé 

Une vendeuse mutilée, des passants dépouillés, des rues paralysées – la jeunesse en détresse, les autorités interpellées. Reportage dans des quartiers de Kinshasa où règne l’ambiance de Far West.

Le 18 mai 2025, la commune de Ngaliema a connu un dimanche noir. Des violences urbaines inédites ont secoué les quartiers Cité des Anciens Combattants (C.A.C) et Manenga, entre 11h et 14h, sur un tronçon situé entre l’arrêt Gramalic et la rue Lubudi, non loin de l’établissement scolaire Les Flamboyants. De jeunes Kuluna, certains à peine âgés de 16 ans, ont semé le chaos, armés de machettes et de stratégies dignes de bandes organisées.

Une vendeuse mutilée à coups de machette

Tout commence sur la rue Mobiango, à Manenga. Une vendeuse de sacs à main et de chaussures y est violemment attaquée à la machette par un groupe de jeunes. Celle-ci tente de protéger sa marchandise, mais ses cris n’empêchent pas les coups. Grièvement blessée, elle est laissée pour morte tandis que ses agresseurs s’éloignent, les bras chargés de biens volés.

Le gang s’organise et piège les passants

Ces jeunes ne s’arrêtent pas là. Ils simulent une bagarre entre eux pour détourner l’attention et justifier leur présence sur les lieux. L’objectif est clair : extorquer les passants et les vendeurs à proximité. Sacs à main, téléphones, chaises et étagères disparaissent en quelques minutes.

Alertés par ces actes, des habitants de la C.A.C s’interrogent en voyant ces jeunes revenir, les bras chargés d’objets volés en quantité inhabituelle, dont des sacs, des chaises, et des étagères. En tentant de les interpeller, ils déclenchent une riposte organisée : une trentaine de jeunes armés, venus de la route de Matadi, débarquent en renfort par la rue Entrée Kodjo. Une violente rixe éclate.

C.A.C en déroute, circulation paralysée

Débordés, les riverains de C.A.C fuient. Les Kuluna, eux, reprennent le contrôle du terrain et intensifient leur pillage. La circulation est paralysée sur plusieurs axes : route de Matadi, quartier Manenga, rues Lubudi et Mobiango. Le sentiment d’abandon est total.

“Forces du Progrès” : Bobo, drogue et influence douteuse

Plus tard, un groupe d’hommes armés arrive sur les lieux. Ils se réclament du groupe Forces du Progrès de l’UDPS, sous la direction d’un certain Bobo, bien connu dans le quartier comme revendeur de drogues auprès de jeunes et enfants. Il est souvent accompagné de son acolyte Sokofele.

Ce groupe promet une forme de médiation. Bobo revient en fin d’après-midi avec chaises, tables et casiers, récupérés de force auprès des jeunes voleurs. Certains commerçants retrouvent leurs biens, mais la majorité des victimes – piétons et vendeurs de rue – restent sans recours.

Encore des machettes : Kribo sous les lames

Le chaos ne s’arrête pas là. À vingt minutes de marche, sur l’avenue Mbanza Mboma, vers le coin Kribo, deux gangs s’affrontent : l’un venu du quartier Mfila, l’autre de Binza Village (Manenga). Une femme, s’accrochant à son sac, reçoit plusieurs coups de machette à la poitrine. Un homme est tailladé au cou, soupçonné à tort d’appartenir à l’autre camp.

Un quartier en détresse, une jeunesse abandonnée

Face à cette situation, la jeunesse de Manenga se mobilise. Elle exige l’installation urgente d’un poste de police dans le quartier. Les postes actuels de la Police nationale congolaise (PNC) ne suffisent plus à rassurer ou à contenir la montée de la violence.

Le dossier est désormais sur la table du bourgmestre intérimaire, M. Fulgence Bolonkomo, et de son adjoint, M. Jules Kabwanga. Leur responsabilité est désormais engagée.

Questions en suspens

Jusqu’à quand la population devra-t-elle faire face seule à des groupes violents organisés ?

Jusqu’à quand l’enfant mineur deviendra-t-il bourreau armé de machette dans nos rues ?

Et surtout : où est passée l’autorité de l’État dans ces quartiers laissés aux mains de la peur ?

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